Excusez-moi, j'étais aux vécés.
Dimanche, en plus d'être la veille du 23 avril, et le lendemain du 21 avril, ce qui n'arrive qu'une fois dans l'année, c'est aussi le premier tour de l'élection présidentielle (oui, j'insiste sur le singulier : un président, une élection, deux scrutins, ne confondons pas tout). Quelle que soit l'issue du scrutin, on peut au moins prévoir une excellente nouvelle : la campagne électorale, l'une des plus désastreuses qui fut (bravitude, génétique, drapeau, ni droite ni gauche, etc.), va s'achever dans un peu plus de deux semaines. Et puis, après tout, si le peuple de France, celui-la même qui se gargarise de porter en son sein les valeurs d'humanisme et de liberté, décidé de porter à l'Elysée un simili-dicateur, on peut espérer que cette campagne soit la dernière, car ensemble, avec Nicolas Sarkozy, pour un quinquennat qui dure mille ans !
Le choix, cette année, se fera entre douze candidats. Par élimination, on peut se débarasser de ceux dont on se demande sincèrement ce qu'ils font là. Gérard Schivardi, candidat des mères, des maires, ou de maires (on ne sait plus trop), trostkiste poujadiste obsédé à l'idée de quitter l'Europe, preuve s'il en fallait que les vieilles lunes de l'extrême-droite traversent l'échiquier politique avec une certaine aisance. Frédéric Nihous, deux couettes, candidat de la "ruralité" [sic] présenté par ce ramassis de beaufs de la gachette mal léchés que sont les chasseurs, pécheurs, naturistes, et traditionnalistes de Chasse, Pêche, Nature et Traditions. Philippe de Villiers, dont la mort politique semble, gloire à Toi, s'annoncer enfin.
Passés ces quelques rigolos dont on peut espérer qu'à eux trois ils ne cumulent pas plus de 3% des votes, reste l'ineffable Arlette Laguillier, que tout le monde s'évertue à trouver sympathique, sentiment motivé par on ne sait quelle mansuétude ou condescendance mal placée, tant le discours d'Arlette fleure bon un populisme anti-système que 30 ans de redondance n'ont toujours pas parvenu à me la rendre sympathique. On retrouve également José Bové, dont on soutint, on ne sait guère pourquoi, la candidature, et dont la dynamique de campagne ne fit que décevoir. Marie-Georges Buffet, dont les réflexes staliniens ont contribué à l'échec d'une candiature anti-libérale qui, en ces temps incertains, eut été si salutaire. Dominique Voynet, à qui l'on a fondamentalement rien à reprocher, mais qui devrait malheureusement effectuer un solide ménage de printemps dans un parti qui semble enfermé à jamais dans la spirale de l'échec. Olivier Besancenot, pour qui l'on aurait voulu voter, sans doute parce qu'à "la gauche de la gauche", il s'agissait d'un des candidats les plus intelligents et naturels, et ce malgré l'enfermement dans une logique de parti qui laisse colère.
Au final, reste donc le quarté dans le désordre. Jean-Marie Le Pen, la bête immonde, qui malgré les courbettes que s'accordent à lui faire certains candidats, et la banalisation de son discours à travers certains médias, n'en a pas perdu pour autant de sa dangerosité et de son pouvoir de nuisance. Le vote Le Pen échappe à tout le monde, et maudit soit celui qui oserait prétendre que le choc du 21 avril 2002 n'était qu'un bug politique.
François Bayrou, dont on a peine à comprendre comment certains électeurs de gauche, ou du moins qui se déclarent comme tel, viennent à se découvrir une passion pour le discours. Illusion d'un vote "anti-système", donc populiste malgré tout. Illusion du "bon sens près de chez vous", comme s'il s'agissait de gouverner un pays comme on dirige une échoppe d'artisan. Illusion d'une position de posture dont on n'imagine guère ce qu'elle pourrait accoucher. François Bayrou, enfin, celui qui jeta un million de personnes dans la rue lors de la tentative avortée d'accorder encore plus d'argent à l'école privée. François Bayrou, l'homme qui dit non, mais qui a dit "oui" tant de fois. François Bayrou, pourquoi ?
Nicolas Sarkozy, celui qui donna à la droite ce dont elle rêvait secrètement depuis tant d'années : un bagage idéologique d'extrême droite. Un projet de société qui mélange joyeusement sécuritarisme acharné, haine de l'autre, mépris des classes populaires, le tout teinté d'une conception toute droitière de l'être humain : libre d'écraser, de dénoncer, et pourquoi pas de stériliser son prochain.
Il n'en restait donc plus qu'une. On ne l'aime pas trop, on ne lui fait guère confiance. Ses saillies sur le drapeau, son acharnement à défendre la "valeur travail" comme une fin en soi. Et pourtant. Au fond de nous, reside le secret espoir qu'une femme de gauche, fût-ce sa "gauchitude" a minima, parvienne à donner un nouveau souffle à un pays que cinq années de haine, de mépris et de libéralisme échevelé ont dénaturé.
Dimanche, on déposera sans conviction, mais sans états d'âme, un bulletin Ségolène Royal, "comme un boeuf tire une charrue", pour reprendre les mots du brillant Pierre Marcelle dans Libération .
Car la perspective d'un second tour entre un candidat de la droite la plus dure qui soit et un représentant d'un centre mou "4ème Rep'" apparaît comme la plus glaçante qui soit, celle qui voudrait qu'on ne choisisse, à l'américaine, qu'entre la peste et le choléra. Et que les idéaux de gauche soient relégués aux livres d'histoire.
* A quelques jours du scrutin, on ne saurait que recommander la lecture d'un excellent ouvrage, "21 avril, les lendemains qui déchantent", de Marie Radovic et Loïc Rivalain, compilation d'entretiens réalisés avec autant d'anonymes (dont votre fidèle serviteur, toujours prêt à dispenser la bonne parole en toute modestie) que de personnalités à propos de "leur" 21 avril. En vente chez tous les bons libraires, mais aussi les mauvais .
“Frédéric Nihous, deux couettes”
Nan, rien, ça va me faire la journée, et je t’en remercie.
Excellente analyse bravo. Je partage les mêmes idées que toi sur les candidats. Plus le premier tour s’approche, plus la peur de voir s’annoncer un second tour droite-droite ou droite-extreme droite m’envahie. Tu parles d’un Bayrou populiste, je suis enfin fier de l’entendre dire par quelqu’un. Cette personne qui sous-entend amener le changement, amener une alternative aux politiques qui se sont succédées n’est qu’un enfant du système politique libéral, qui sous ses faux airs cachent bien son jeu. Son alliance perpétuelle à l’UMP montre qu’il n’est en rien un candidat consensuel. On va chercher les voix là où on le peut. Mais quelle facilité, de dire qu’on peut arranger ainsi le paysage politique , quelle démagogie électorale dégoutante. Si je suis bien d’accord avec Sarkozy sur un point ( et une fois n’est pas coutume ) c’est que droite et gauche sont pour moi deux types de politiques tellement antagonistes que l’entreprise semble directement vouée à l’échec. Sarkozy prenait l’exemple des 35 heures. La gauche veut les conserver, la droite veut les supprimer. Comment peut-on arriver à un accord dans un gouvernement qui se voudrait à la fois représentatif de gauche et à la fois réprésentatif de droite. Certain diront : tant que l’on a pas essayé, on peut pas juger. Peut être que ca peut marcher. Oui, ils ont surement raison. Mais je ne veux pas prendre le risque de perdre 5 ans pour voir gouverner la France sous la vraie nature de Bayrou, à savoir une droite soft, mais qui n’a rien de socialiste.
Je suis d’accord pour Besancenot. Ayant assisté à un de ses meetings il représente ce que l’on doit attendre d’un homme politique. Quelqu’un qui incarne le changement, la confiance, l’action surtout, un vrai homme de terrain. Le problème c’est qu’avec Besancenot, si l’on est de gauche on est forcement d’accord avec lui, puisqu’il tape sur tout ce qui bouge, et il le fait bien. J’ai eu furtivement l’envie de voter pour lui. Mais en ce penchant sur son programme je me suis vite fait une raison et j’ai découvert que voter a l’extrème gauche n’est pas une solution.
Le vrai changement reste pour moi dans les mains de Ségolène Royal. Encore une fois tu as raison, on ne l’aime pas trop. Elle semble autoritaire. Un peu gaffeuse, pas forcement les épaules. Mais elle représente la gauche dynamique. Son programme est sans doute moins a gauche que Jospin en 2002, mais pouvons nous réellement garder une gauche comme on en avait il y a 40 ans ? Je ne le pense pas, la mondialisation, la crise nous oblige à changer. La
Désolé erreur de mouvement, je n’avais pas fini mon message précédent :
Pour en venir à Sarkozy, je pense que je n’ai pas grand chose à ajouter. Cet homme est une bombe en puissance, qui peut faire éclater la France de toute part. Ce lèche de Bush qui bave devant sa politique ultra-libérale. Pour une fois je suis d’accord avec Bayrou ( une fois n’est pas coutume ) mais est-ce normal pour un “futur” président d’aller dans une cité, dans la ville de l’un de ces meilleurs amis et pas forcement la plus problématique qu’il soit avec 300 flics pour 100 jeunes c’est grave. C’est grave mais c’est représentatif de la politique que veut nous installer Sarkozy.
Alors chers Francais, faites le bon choix, car le destin de la France est entre vos mains. On vit sans doute l’une des phases les plus importantes pour le pays et son avenir. Réfléchissez à deux fois avant de voter pour le premier démago venu… A bon entendeur, salut.
Salut,
Moi aussi j’ai bien aimé, d’ailleurs c’est moi qui ai filé l’adresse au Jospiniste : je savais que ça allait lui plaire.
Dans l’ensemble je suis d’accord avec ce que tu dis, bien que je sois un peu l’électeur de gauche qui vote Bayrou.
Enfin ça dépend des fois.
D’un côté, on se dit que Ségolène Royal n’a vraiment rien à foutre là ; on se dit que c’est vrai que c’est un brin relou que la droite n’admette pas la moindre bonne idée venant de la gauche et inversement ; on l’écoute parler et on se dit que même si son parti est officiellement de centre droit, il semble se décaler vers la gauche ; on lit le programme de Bayrou et on trouve ça beaucoup plus concret que celui de Royal…
De l’autre côté, on se demande si ce n’est pas juste de la démagogie venant de quelqu’un qui s’est toujours allié à l’UMP ; on se rappelle que nos idées sont de gauche, pas de centre droit ; on se demande si sa vision des choses n’est pas un peu utopiste ; et on se souvient que si Ségolène est élue, elle aura un gouvernement à ses côtés… Peut-être même Strauss-Khan premier ministre ?
Dur de choisir. Je disais tout à l’heure que je votais Bayrou, mais j’hésite encore entre lui, Ségolène Royal, Dominique Voynet ou blanc. Ayant en fait, et même si ça m’emmerde profondément, éliminé les deux derniers pour ne pas gacher un vote anti-Sarkozy.
Enfin de toute façon je voterai pas, j’ai pas encore 18 ans
Cela dit, je suis chargé de décider du vote de ma soeur…
Il me reste combien de temps, déjà ?
Putain. Deux mois d’absence, un post et trois commentaires de deux pages en deux heures. Tu es définitivement ma star, Zefede.
Brillante analyse, comme toujours.
Mais comme les gens doués m’énervent, j’irais voter Sarkozy.
(j’décôôônnnnnnnnneuh)
J’y crois pas mon commentaire a disapru !
artypop > si tu parles de celui posté à 9h11, moi je le vois
Bah ouais, je le revois ! Hier, non, je pensais à une censure de ce gauchiste de Zefede.